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Les images médiatiques - L'image, une arme percutante

Agrandies, recadrées, détourées, les photos prennent différentes formes. D'après l'étude de Jacques Douël, " de tous les éléments qui composent le journal, elles (et les dessins) constituent les pôles d'attraction les plus puissants. Elles attirent autant et plus l'attention des lecteurs que ne le font les titres, et en tout cas significativement plus que les textes ". L'image est une arme percutante qui frappe l'imagination beaucoup plus que la lecture d'un article; on peut nuancer un texte tandis que la photographie est livrée brute et va droit au but. Le lecteur dira rarement qu'une chose est vraie puisqu'il l'a lue dans son journal, mais il n'aura aucun doute sur ce qu'il a vu dans ce même journal.

L'image ne constitue pas un langage universel

Une idée trop couramment admise est que l'image peut être comprise de tous (…), quels que soient l'âge, le niveau culturel, la nationalité, l'origine ethnique, la langue. L'image serait donc ce langage universel permettant la grande fraternité (…) dans une compréhension mutuelle. Il n'en est hélas rien !

S'il est vrai que l'image franchit plus facilement que les mots la barrière des langues et que, pour cette raison, on l'emploie assez largement dans les lieux de rencontre internationaux (aéroports, grands hôtels, etc.), on doit constater que ce langage est à la fois très pauvre et très limité.

La principale difficulté vient d'abord du fait que l'image, réduite à elle seule, est pauvre en signification. " L'image pose plus de questions qu'elle ne donne de réponses : qui est représenté, dans quel lieu, dans quel contexte ? " écrit Daniel Grojnowki. " En somme, il lui manque la parole. Privée des mots qui la feraient signifier, elle montre sans rien dire. L'enfant sage comme une image est celui qui reste silencieux. "

Cette pauvreté, surtout lorsqu'il s'agit de photos, ouvre le champ à des significations diverses. Elle est polysémique et chacun peut l'interpréter à sa manière.

À ceci s'ajoutent les difficultés de compréhension venant des lecteurs eux-mêmes, en particulier :

  • de l'habitude ou du manque d'habitude de lecture des images. Si nous avons appris à lire des textes, personne ne nous a jamais enseigné à déchiffrer les images (…);
  • des traditions et des mœurs différentes des lecteurs, une diagonale allant de l'angle inférieur gauche à l'angle supérieur droit d'un rectangle évoque, pour l'Européen habitué à lire de gauche à droite, l'idée de montée, d'ascension; pour l'Arabe qui lit de droite à gauche, cette ligne signifiera descente; le blanc est pour nous synonyme de joie et signe de deuil pour les Asiatiques, etc.;
  • du fait que chacun projette ses propres sentiments sur l'image, contribuant ainsi à la déformer et à en changer la signification.

Contrairement à l'idée reçue, l'image n'est pas objective

L'image photographique n'est pas et ne peut être objective pour plusieurs raisons :

  • parce que, au départ et tout au long du processus de fabrication du journal, une série de choix forcément subjectifs vont intervenir :
    • choix du point de vue du photographe qui est sur le terrain et qui adopte tel angle plutôt que tel autre, ce cadrage-ci plutôt que celui-là, etc.;
    • choix d'une photographie parmi d'autres par le maquettiste ou le chef de pupitre;
    • choix d'un nouveau cadrage lors de la mise en pages, avec pour conséquences d'éliminer certaines informations et d'en mettre d'autres en valeur;
    • choix de l'aspect formel lors du tirage des épreuves. Certaines techniques dramatisent, d'autres adoucissent, enlaidissent ou flattent, etc. Lorsqu'il s'agit de photos en couleur, les rouges et les jaunes attirent la sympathie, les bleus et les verts l'inversent parce que la photographie est ambiguë, polysémique. On pourrait remplir un volume des exemples de photographies à qui l'on a fait dire n'importe quoi et souvent des choses absolument contradictoires dans les journaux d'opinions différentes;
  • parce que, justement en fonction de cette polysémie, le texte qui accompagne le document peut en changer complètement le sens;
  • enfin, parce que la mise en pages elle-même, alors qu'elle n'a aucune influence sur le texte, peut modifier la signification de la photographie. Que le discours du président de la République sur la situation économique et l'emploi soit composé (en tel ou tel caractère typographique….) et quel que soit l'article auquel il est juxtaposé et la page dans laquelle il figure, le contenu et la signification du discours n'en seront pas modifiés. Par contre, la photographie du même président prendra un sens différent selon qu'on va l'accoler à une photo représentant une queue de chômeurs devant un bureau de l'ANPE ou à une photo d'une entrée d'usine avec au premier plan des panneaux signalant des offres d'emploi.

C'est donc l'ensemble titre, texte et image qui, en fonction d'une mise en pages, va devenir signifiant et fournir le message global.

Le cadrage des images dans la presse

Le premier stade de la préparation d'un document consiste à le cadrer. On devrait plutôt dire le recadrer, car il est évident qu'en déclenchant l'objectif le photographe a déjà procédé à un cadrage. Dans beaucoup de cas il aura lui-même modifié et rectifié ce cadrage lors des opérations de tirage du document. Bien souvent celui-ci sera utilisé par le chef de pupitre avec le cadrage original fourni par le photographe ou l'agence.

Toutefois ce dernier doit parfois procéder au recadrage des documents, c'est-à-dire déterminer la partie de la photographie qu'il retient pour être clichée, et les parties qu'il élimine. Cette opération de cadrage peut être nécessaire pour plusieurs raisons :

  • La première, c'est de permettre une différenciation. En effet, le photographe a pris sa photo en ignorant l'utilisation exacte qui en sera faite et sans savoir ce que l'on voudra faire ressortir. Une photo d'agence est distribuée à des centaines d'exemplaires mais tous ses utilisateurs ne vont pas en avoir les mêmes besoins: l'un désirera plutôt un premier plan, alors que l'autre préfèrera conserver une certaine perspective; chacun cherchera à se différencier des autres pour éviter qu'un document absolument identique ne paraisse le même jour ou la même semaine dans plusieurs publications différentes et parfois concurrentes.
  • Le cadrage permet aussi une mise en valeur de ce qui doit apparaître comme essentiel en fonction du but que l'on poursuit : donner en gros plan les traits d'un personnage ou faire connaître ceux qui l'accompagnent, ou encore situer le lieu où il évolue, etc.
  • À l'inverse, le cadrage permet l'élimination de ce que Paul Almasy appelle " des bruits optiques qui gênent la bonne lisibilité de la photo en attirant inutilement l'attention du lecteur et en parasitant l'information ".
  • Le cadrage permet enfin l'adaptation de l'illustration aux besoins de la mise en pages. Dans tel cas, on peut chercher une opposition entre une photo en hauteur et une photo en largeur; dans un autre, on voudra obtenir plusieurs clichés de dimensions identiques. Dans l'une ou l'autre de ces hypothèses, il sera donc nécessaire de cadrer les documents pour obtenir l'effet recherché.
NOTE : Nous présentons ici un texte extrait de : Antoine Paulus, Langages médiatiques, Dossier pédagogique, Centre audiovisuel de Liège, Liège, 2000, p. 17-18, 20-21, 26-28.

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